Premières concrétisations
Les konzerne
Un Konzern est le terme allemand pour désigner un cartel, c'est-à-dire une association forte, d'entreprises qui restent cependant juridiquement distinctes. Ces regroupements amorcés avant le premier conflit mondial pour s'épargner une concurrence trop rude et maximiser les profits malgré les crises, acquièrent un poids politique tel, qu'ils deviennent hégémoniques dans l'entre-deux guerres. IG-Farben, le cartel de l’industrie chimique, pétrolière et pharmaceutique qui réunissait AGFA, BAYER et BASF est fondé en 1904, le cartel de l'acier en 1926 par August Thyssen (Ruhr) et... François de Wendel (Lorraine) que leur intérêt commun bien compris avait déjà amené à bien s'entendre dès 1914 (affaire de Briey). Financiers et industriels cartelisés trouveront dans les perspectives d'extension des marchés, offertes par la Paneuropa de Coudenhove-Kalergi, le prolongement politique du mouvement qu’ils ont amorcé. Après la 1ère guerre mondiale et la révolution russe, les banques américaines et les gouvernements qui sont sous leur contrôle, vont, avec les plans Dawes et Young, soutenir puissamment l'Allemagne et le projet Pan Européen censé constituer un rempart contre le bolchévisme.
La Banque des Règlements Internationaux
Fondée en 1930 à Bâle, la Banque des Règlements Internationaux (BRI ou BIS Bank for International Settlements) capitalisée par des banques privées, la Federal Reserve Bank of New York, J.P. Morgan, First National Bank of Chicago, et les banques centrales de France, d’Angleterre, d'Allemagne, de Belgique, d'Italie et une cinquantaine d'autres..., était censée collecter et répartir entre les ayants droits, les sommes payées par l’Allemagne au titre des réparations de la première guerre mondiale.
En 1931, Hoover a un autre dessein pour l'Allemagne. Le président des États-Unis d'Amérique propose un moratoire sur le règlement des dommages de guerre qui aboutit à ce que, hormis la dette privée américaine, l'Allemagne soit exonérée du paiement des réparations dont elle n'aura finalement acquitté que 13%. La BRI va alors changer de fonction ; l’argent circulera dans l’autre sens, à savoir qu’il va partir des États-Unis surtout, et de la Grande-Bretagne, pour financer l'industrie allemande. Les investisseurs américains et britanniques vont entrer intégralement ou partiellement, dans le capital de la majorité des sociétés allemandes ayant une importance stratégique ; construction automobile, aviation, ingénierie électrique, radio, construction mécanique. Les secteurs du raffinage du pétrole et de la liquéfaction du charbon passent dans les mains de Standard Oil (Rockefeller). Le géant de l’industrie chimique Farbenindustrie AG est sous le contrôle du groupe de John Pierpont Morgan.
Lorsqu’en 1933, Hitler arrive au pouvoir, l’économie, assainie par l’effacement de la dette, est dopée par les investissements de capitaux étrangers. Il dévoile son projet de Nouvelle Europe calquée sur la Paneuropa et envoie dans les camps de concentration des milliers d'opposants politiques ; communistes surtout mais aussi socialistes, démocrates chrétiens, juifs, asociaux, droits communs, malades mentaux... Les féodalités financières cartelisées sont devenues ses plus puissants soutiens, à moins qu'il ne soit lui-même devenu leur plus puissant instrument !
En France, le groupe dirigeant du grand capital, dit des Deux Cents Familles (les 200 plus gros actionnaires de la banque de France) constitué dès 1922, en « Mouvement Synarchique d'Empire » ayant pour but de remplacer la République par un régime dictatorial, observait la situation allemande avec convoitise.
https://books.google.fr/books?id=ns7qAgAAQBAJ&pg=PP32&lpg=PP32&dq=mouvement+synarchique+d'empire+annie+lacroix+riz&source=bl&ots=eaV8VhDcb6&sig=OIhoKcycArpN67nvw5HH9sBLGiE&hl=fr&sa=X&ved=0ahUKEwji0dSF867TAhWBmywKHbKODwsQ6AEIUDAG#v=onepage&q=mouvement%20synarchique%20d'empire%20annie%20lacroix%20riz&f=false
Les konzerne impliquent toutes les grandes sociétés allemandes puis anglaises, françaises, américaines… c'est le plan Schacht (du nom de celui qui fut directeur de la Reichsbank, ministre de l’économie d’Hitler...) que l'oligarchie mondiale accueille avec empressement ; « Louis Renault avait prôné à Hitler dans un long entretien de février 1935 à la chancellerie du Reich la création d’un comité européen de l’automobile, ce cartel surtout franco-allemand, sera fondé entre novembre 1940 et mars 1941 par son neveu et ancien directeur général des usines Renault, François Lehideux », détaille la chercheuse Annie Lacroix-Riz (Industriels et banquiers sous l'occupation).
En juillet 1935, lors d’un banquet aux usines Renault, en l’honneur d’une délégation du patronat de l’Italie fasciste de Mussolini, Louis Renault déclare : «Votre pays et son admirable chef viennent de donner au monde un bel exemple d’ordre et de discipline». En 1938, le cartel de l'acier qui a ses bureaux au Luxembourg est devenu le gendarme mondial du commerce de l'acier qu'il contrôle à 90 % (Thyssen et Krupp en Allemagne, De Wendel et Schneider en France, Cockeril en Belgique, Armstrong en Angleterre). En 1939, plus de 2000 sociétés ont passé des accords les liant à un cartel. Les millions de dollars d'investisseurs privés, industriels et financiers, qui alimentent l'économie teutonne, transitent par la Banque des Règlements Internationaux, la BRI.